Un RSA conditionnel ?
Tribune de Carole Sourigues, Conseillère municipale déléguée à la Ville inclusive et accessible, dans le Malakoff Info de juin-juillet-août 2023.
Il s’agit d’un projet de loi en préparation, disposant que pour avoir droit à un revenu de solidarité active (RSA) de 607 euros/mois pour une personne seule ou de 911 euros pour un couple, il faudrait travailler un mi-temps, soit une rémunération en deçà, voire très en deçà, du Smic, sans précision sur d’éventuelles cotisations notamment retraite (…) La loi de 1988 instaurant un revenu minimum d’insertion (RMI) fut adoptée à l’unanimité avec le constat d’un nécessaire soutien financier pour ceux de nos concitoyens qui momentanément, parfois durablement, se trouvaient empêchés de parvenir à une insertion profession- nelle et sociale. Avec le revenu de solidarité active, la notion d’un nécessaire ancrage dans une démarche d’insertion fut soulignée et actée.
Mais si la rigueur et parfois même le contrôle s’avèrent nécessaires, les bénéficiaires ont surtout besoin d’un accompagnement qui requiert tech- nicité, empathie et disponibilité. Car rappelons quele non-recours est un fléau qui nuit gravement à l’efficacité de tout programme de protection sociale. L’exigence de prouver sa bonne foi par des heures de travail ferait peser une suspicion sur tous les bénéficiaires. À terme, cela risquerait de renforcer ce non-recours, estimé à 10 milliards par an, pour des bénéficiaires potentiels qui éviteraient ainsi l’humiliation d’une mesure ressemblant à des tra- vaux d’intérêt général ! La notion de responsabili- té collective vis-à-vis des plus faibles, qui présida à la création de minima sociaux, régresse mainte- nant vers l’idée d’une faute individuelle, de la figure du pauvre, malhonnête et fraudeur.
Or, « La “pauvrophobie” est aussi toxique et nuisible que le racisme, le sexisme et d’autres formes de discrimination, et doit être traitée comme telle ». (Rapport des Nations unies sur la pauvreté). Ne laissons donc pas la rationalisation d’une politique de solidarité devenir un prétexte pour transformer les allocataires en travailleurs sans droits.
Pour retrouver le Malakoff Info de juin-juillet-août 2023 en entier, c’est ICI.
Pour retrouver toutes les publications de Carole Sourigues, c’est ICI.