Intervention de Catherine Picard – Conseil départemental du 11 décembre

Retrouvez mon intervention sur le développement durable faite en séance publique du Conseil départemental du 11 décembre.

En conclusion, j’ai demandé que le Conseil départemental des Hauts-de-Seine rejoigne les 24 départements qui demandent la « généralisation dès aujourd’hui » du revenu de base.

Rapport 20.93 Développement durable

Je tiens tout d’abord à remercier les auteurs de ce document très riche en informations. Il a été rédigé en pleine période de crise provoquée par le coronavirus mais ne relève pas de la période du COVID-19.

Je ne vais pas me lancer dans une analyse de chaque point de ce rapport qui décrit parfaitement les choix de votre politique tout au long de ces années.

Je prendrai quelques exemples qui montrent à quel point les options faites par cette assemblée ne tiennent pas compte de la définition du développement durable qui doit répondre au besoin du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre à leurs propres besoins.

Mais avant tout, permettez-moi d’être étonnée par les contradictions des messages que le Conseil départemental envoie. Les Entretiens Albert-Kahn se positionnent comme un laboratoire pour l’expérimentation d’actions publiques innovantes, dans la ligne droite des réflexions et des actions du Développement Durable, cité dans ce rapport page 83.

J’ai assisté le 12 novembre dernier aux Entretiens Albert Kahn sur « VIVRE LOCAL : NOUVELLE TENDANCE OU NÉCESSITÉ ? ».

Je cite l’introduction de ces entretiens que l’on peut retrouver sur le site du département : L’aspiration à vivre mieux localement, en se déplaçant sur de moins grandes distances, en faisant ses courses dans son quartier, en ayant accès à un environnement de qualité (vert, sans pollutions, esthétique…) existe depuis longtemps. Elle a pris un nouveau tournant avec l’urgence écologique : une partie de la population française, de plus en plus nombreuse, qui aspire à vivre de manière plus sobre, en faisant appel à des produits français, locaux et dont la traçabilité est garantie.
Plusieurs projets pionniers émergent comme la refonte de l’approvisionnement des cantines, la lutte contre la précarité énergique et la valorisation des énergies citoyennes, la revalorisation des centres-villes etc.
Et nous avons eu la chance d’avoir des intervenantes ou intervenants tout à fait passionnants, comme Nicolas Colin qui nous a fait partager sa vision de l’économie et de la société et Diana Filippova qui nous a expliqué comment la ville de Paris s’investit sur un projet « La ville du quart d’heure », tous les services à moins d’un quart d’heure à pied ou en vélo.

Vous comprendrez que l’introduction de la partie 2 pourtant intitulée « Pour un territoire solidaire » ne correspond pas du tout au développement de ce chapitre.
En 2019, vous vous êtes engagés dans la réorganisation du pôle solidarités.
Elle regroupe tous les services recevant du public (pôles sociaux et leurs satellites.
Centres de PMI, CPEF, Espaces Insertion).
Et nous voyons le projet de création de 13 services des solidarités territoriales (SST) aux dépens des services qui existaient dans chacune de nos 36 villes.

En prenant exemple sur les villes qui concernent et entourent mon canton, je cite le rapport : « Le Département a inauguré le 26 septembre 2019 un nouveau pôle social à Chatillon. Ce pôle social, ouvert depuis fin mai 2019, incarne un nouveau visage de l’action sociale et vise à faciliter le parcours de l’usager. »
Malgré cette belle présentation, en tant que citoyenne, j’ai fait une expérience intéressante : de la mairie de Malakoff au pôle social Chatillon, on met 27 minutes en bus et 36 minutes à pied.

Je vais rester sur ce chapitre des solidarités et ses réorganisations parce qu’il me semble le plus parlant. Vous dites qu’avec 1 million 600 000 Altoséquanais, le département met en œuvre une politique ambitieuse en matière de solidarité : cette nouvelle organisation doit améliorer l’offre de service aux citoyens en mettant en place un plan d’action personnalisé qui couvre les attentes de l’usager et de sa famille.

A l’heure actuelle, les villes qui n’ont pas la chance d’avoir les services sociaux du département sur leur commune reçoivent d’abord les habitants au CCAS qui ensuite les oriente vers le pôle social afférant : perte de temps pour les services municipaux et probablement, pour les habitants qui ne retrouvent pas leur chemin !

Je vais m’en tenir qu’aux chiffres énoncés dans ce rapport :

  • Pourcentage de femmes enceintes suivies par rapport au nombre de naissances domiciliées : 2015 : 19 %, 2019 : 11 %,
  • Taux de couverture des bilans de santé pour les 3-4 ans scolarisés : 2015 : 82 %, 2019 : 58 %,
  • La part des mesures éducatives/ensemble des mesures de protection de l’enfance :  2015, 57 %, 2019, 49 %,
  • Nombre de consultations de planification familiale et d’entretiens de conseil conjugal : 2015, 23 716, 2019, 12 211.

Aucune explication de la baisse de fréquentation suit ces données.

Si l’analyse de ces statistiques était approfondie, nul doute que vous seriez obligés de reconnaître que l’éloignement géographique dû au regroupement des services sociaux dans un même lieu, est un échec.

Les modes de transports s’avèrent être une source de pollution incontestable. Alors que pendant de nombreuses années, on prétendait que le vélo n’était pas praticable en région parisienne, les périodes de confinement dues au coronavirus ont démontré le contraire, surtout dans les territoires balisés de pistes cyclables et de véloroutes.
Il y a urgence à réagir.

Dans l’observatoire vélo dans les Hauts-de-Seine, vous pouvez lire l’intérêt quotidien des habitants pour le vélo. Notre canton est d’autant plus concerné que le relevé de Malakoff montre d’une part un usage de déplacement utilitaire plus que de loisir (81 % en semaine et 19 % le week-end) et d’autre part, un nombre de passages extrêmement important par rapport à l’ensemble du département.

Or le rapport nous présente une évolution du linéaire de pistes cyclables aménagées : 2015 : 125 km, 2017 : 144 km, 2019 : 150 km, qui ne tient pas compte de la progression de l’usage du vélo qui a bondi de 52 % depuis 2013 à Paris ni de l’augmentation de son usage depuis un an de 35 % en milieu urbain, selon le bulletin de fréquentation du réseau Villes et Territoires.

Nous attendons avec impatience le plan de développement des circulations. Et je laisse mon collègue, Joaquim Timoteo, vous présenter nos questionnements sur les pistes cyclables provisoires.

Et puisque ce rapport décrit l’insertion sociale et la lutte contre la pauvreté, je voudrai conclure en proposant à notre assemblée de rejoindre les vingt-quatre départements qui ont demandé samedi 5 décembre 2020, dans une lettre ouverte aux parlementaires, une « généralisation dès aujourd’hui » du revenu de base.
« Assez de temps perdu » écrivent-ils. La crise sociale, qui accompagne le trou d’air économique et la crise sanitaire, s’accélère.
Le constat de la crise est rude : huit millions de personnes bénéficient de l’aide alimentaire et elle touche durement les jeunes.

Je cite « Les jeunes en particulier, qui représentent déjà plus de la moitié des personnes pauvres en France, sont durement frappés par cette crise, alors même qu’ils n’ont pas accès aux minimas sociaux. » souligne pour exemple le président du département de la Gironde.

La généralisation du revenu de base « est à même d’absorber une partie de la vague de pauvreté que nous connaissons, et d’offrir à toutes ces personnes une chance de rebondir, de reconstruire leur projet de vie. »

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